L'hiver dans les Alpes : une escapade et deux récits de vies
Ce week-end, nous avons rejoint mes parents à la montagne, dans le Champsaur-Valgaudemar (05), pour un court mais très chouette séjour "air frais et camembert chaud"... :-p Nous avons aussi vu la neige pour la première fois de la saison et avons même fait quelques pas sur un parking rudimentaire saupoudré de blanc : quel bonheur ! (sauf pour la toute petite chienne de mes parents qui avait froid aux pattes ^_^) Une joie dont Geneviève/Allie a parlé tout récemment sur son blog.
Au fond d'une vallée, on a même trouvé un joli hameau pittoresque et préservé, tout en pierres grises et toits rouillés ! Les habitants (principalement des travailleurs de l'ONF) avaient décoré de vrais conifères bien verts à l'aide de médaillons en bois peints au pochoir : charmant !
Ceci pour vous expliquer qu'aujourd'hui, j'ai été prise d'une irrésistible envie de neige, de sapins et de beaux témoignages... Alors, je vous ai choisi deux récits appartenant à la "littérature du terroir" (mais qui sont bien plus que cela), liés aux mois les plus froids de l'année.
Je vous ai déjà parlé de cette fille de paysans, devenue institutrice de montagne au début du XXe siècle, dans les Hautes-Alpes. Emilie Carles, née en 1900, a raconté son admirable parcours dans une merveilleuse autobiographie que j'ai déjà lue plusieurs fois et qui est parue en 1977 : Une soupe aux herbes sauvages, devenue un téléfilm avec Annie Girardot, 20 ans plus tard.
Dans cet ouvrage, Emilie nous raconte son enfance à la ferme, dans la vallée de la Clarée, alors qu'elle est la seule parmi 6 enfants à recevoir une éducation. Elle raconte comment son frère aîné lui a fabriqué un bureau portatif pour qu'elle puisse réviser ses leçons en marchant jusqu'à l'école (photo ci-dessus). Et comment, lors des veillées, elle entend les anciens de son village parler des dernières attaques de loups du coin. Sans oublier le rituel du four communal, où on cuisait le pain...
Ce pain, qui devait durer tout l'hiver, nous le portions au grenier, nous l'étalions sur d'immenses tréteaux suspendus et c'est là que nous allions le chercher au fur et à mesure de nos besoins. Ce pain avait une odeur extraordinaire, et un goût !
Après le pain, c'était l'hiver. Les premières neiges viennent vite par ici. Le seul chauffage était celui du bois et les poêles étaient encore rares. Pour se protéger du froid, les familles se cantonnaient dans les pièces communes, dans la cuisine où il y avait la cheminée et dans l'étable où la chaleur des bêtes entretenaient une température supportable.
Plus âgée, lorsqu'elle enseigne en altitude, elle parle de cette avalanche qui a failli emporter sa classe et ses petits élèves ; des briques chaudes qu'on lui offre pour les mettre sous ses pieds quand elle travaille...
C'est un autre temps et presque un autre monde qu'Emilie nous dépeint. Et il lui a fallu une grande force de caractère pour supporter tout ce que la vie a semé sur sa route !
Ceci n'est malheureusement pas l'exemplaire original avec lequel j'ai découvert la Soupe il y a de nombreuses années. Choco-Mum m'avait confié son édition à elle, plus vieille, mais l'amie à qui elle a prêté son livre ensuite l'a abîmé et remplacé par celui-ci. Dommage... mais le cahier-photos est toujours là, ouf ! (clic)
Si vous ne connaissez pas cet ouvrage, qui se trouve ❤ en bonne place dans ma bibliothèque de cœur ❤, il ne vous reste plus qu'à le rencontrer pour l'aimer. Je me souviens l'avoir lu pour la toute première fois lors d'un séjour dans le Briançonnais, étant collégienne.
320 pages
Bien plus tard, en vacances à Saint-Jean de Maurienne en 2008, j'ai acheté l'ouvrage de Pierrette Coltice, Journal d'une institutrice en montagne (1936-1945). "Petite sœur" d'Emilie, l'auteure relate ses années d'enseignement à Thollon, en Haute-Savoie, et une aventure bien particulière, vécue en compagnie de son amie et quasi jumelle...
Un samedi de fin d'automne, la classe terminée et juste avant la nuit, Raymonde arriva chez moi pour une dernière visite avant l'hiver. La soirée fut joyeuse. Le dimanche matin, le ciel devint très nuageux. Dès le repas de midi, la neige se mit à tomber et le vent se déchaîna. Ma compagne avait le souci d'être rentrée afin d'assurer son service le lundi matin à huit heures.
Nous voilà grimpant à fond de train. Les arbres servaient de repères et tamisaient la neige. Transpirantes, essoufflées, nous atteignons le col. Qui n'a jamais essuyé une tempête de neige - celle qu'on appelle tourmente - ne peut se rendre compte.
Certes moins captivant que l'histoire de madame Carles, dans un style moins travaillé aussi, ce carnet de bord, agrémenté de dessins et de photos et d'extraits de cahiers d'époque, se lit tout de même très agréablement et n'en reste pas moins un précieux document sur la vie montagnarde.
230 pages
Vous ne serez guère étonnés d'apprendre que ces deux livres sont rangés côte à côte dans une de nos bibliothèques et qu'ils ont l'air de plutôt bien s'entendre ! ^_^
Lecture-écho (un souvenir de lecture très fort) :