Hubert Haddad, "Le peintre d'éventail"
Chant des mille automnes
le monde est une blessure
qu'un seul matin soigne.
2011. Au pied d'anciens volcans, dans la région montagneuse d'Atôra, au nord-est de l'île de Honshu, se trouve la pension de famille de Dame Hison, une ancienne prostituée qui a choisi de démarrer là une nouvelle vie. Quand elle a acquis le domaine, l'ancien propriétaire lui a expressément demandé de garder près d'elle une vieille servante et un jardinier sans âge, locataire de l'atelier au fond du parc. Le vieil Osaki est aussi poète et peintre d'éventails. Bien des années plus tard, lorsque Matabei, fuyant le drame dont il ne se remettra jamais, s'installe chez Dame Hison, le maître-artiste en fin de vie lui enseignera l'art de la peinture, celui des haïkus et également l'art d'agencer un jardin merveilleux.
"Jardiner, c'est renaître avec chaque fleur."
(pour une description somptueuse de l'écrin végétal qui entoure le gîte, voir le billet du R-A-T de dimanche)
Les premières pages m'ont laissée perplexe du fait de plusieurs "faux départs" dans le récit et de changements de narrateur, toutefois le malaise n'a pas duré. De nombreux personnages, tantôt étranges, tantôt fascinants, peuplent ce court roman d'atmosphère qui tournera à la tragédie aux deux-tiers. Car c'est l'histoire d'un accident et de deux séismes dévastateurs (ou plutôt 3, si l'on compte l'amour né tardivement dans le coeur du vieux Matabei). Texte initiatique, dur par plusieurs aspects (le deuil, la culpabilité, le devoir, la presque-fin du monde du 11 mars 2011) mais qui invite à mesurer notre respiration, à ouvrir les yeux sur les saisons et sur la nature qui nous entoure, Le peintre d'éventail fait penser à une tasse de thé qui infuse doucement et se savoure en prenant son temps. Dernière chose : la fin est particulièrement soignée... avec un brin d'inattendu.
180 pages
Ailleurs : la chronique de Jérôme ; celle de Pauline.