Xavier-Laurent Petit, "L'attrape-rêves"
Voici un roman qui nous emmène dans une bourgade indéterminée des USA, possiblement au Nord-Ouest dans l'Etat de Washington ou, carrément au Nord-Est, au nord de l'Etat de New-York ; mais le récit pourrait aussi bien se dérouler dans les montagnes de Californie ou bien dans les Rocheuses. Bref, un peu n'importe où, mais il faut que ce soit un coin coupé en deux, entre une zone située dans la vallée, où se trouve le lycée fréquenté par Louise, 16 ans, et une zone de montagne, où vivent ceux d'en-haut, comme Louise justement, et qui doivent prendre le bus jaune General Motors, le long d'une route très escarpée, pour gagner les hauteurs : en altitude, il y a la scierie et pas grand-chose d'autre (oui, l'ambiance fait très "Twin Peaks"). Alors quand la scierie ferme, la population d'en-haut est très affectée. D'autant que cela coïncide avec l'arrivée d'un jeune Indien taiseux, Chems, et de sa mère célibataire, tous deux pauvres, logeant dans une caravane dans les bois. Alors que Chems est rejeté par tous à l'école, Louise se prend d'intérêt pour lui et échappe régulièrement à la surveillance de son père pour aller le retrouver. Bientôt, un projet de grand barrage voit le jour : leur village sera inondé et rebâti encore plus haut ; à ce moment-là, que restera-t-il de leur ancienne vie ?
J'ai beaucoup aimé la galerie de personnages qui donnent vie à ce livre : Louise, qui n'a plus que son père ; Chems le sauvage, qui n'a plus que sa mère ; Dolorès, la conductrice du bus scolaire, douce et rebelle ; Steph, le gars rustre sans ambition ; sans oublier Mr Harrison, le meilleur prof du lycée :
"Des millions de gens vivent sans lire, Louise, mais ce qu'ils ignorent, c'est qu'on vit infiniment plus en lisant."
Par ailleurs, pour un auteur français, X-L. Petit a, à mon avis, vraiment réussi à rendre l'atmosphère typique de ces villes reculées des Etats-Unis... Il y a un côté sauvage dans ce livre (ours noirs, wapitis et loups compris), comme une planche encore très rugueuse. Et sa dimension sociale est également intéressante : on y trouve les thèmes de la différence, de l'appartenance à une communauté (mais jusqu'à quel point ?), de la maladie, du libre-arbitre. Ce roman, repéré chez Margaud Liseuse puis chez Virginie du blog Pluie de mots, fut une très belle découverte.
271 pages
Déjà chroniqués, du même auteur : Piège dans les Rocheuses - Le col des Mille Larmes - Le Monde d'En Haut.