Rhys Bowen, "Son Espionne Royale et le mystère bavarois" (tome 2)
Après avoir été charmée par le tome 1, j'ai retrouvé avec un immense plaisir l'Ecossaise Lady Georgiana de Rannoch, 21 ans, désormais installée à Londres, toujours fauchée et toujours occupée par son entreprise du Diadème (inavouée et inavouable) : elle nettoie, aère et prépare des maisons londoniennes juste avant que leurs propriétaires ne rentrent de leur résidence de campagne...
Juin 1932. Georgie se voit chargée par sa tante d'une étrange mission. Espérant que son fils David, le Prince de Galles, se désintéressera de Wallis Simpson, vieille araignée deux fois divorcée, s'il rencontre une jeune, fraîche et authentique princesse, la reine Mary demande à Georgie d'héberger la princesse Hannelore de Bavière. A 18 ans et tout juste sortie de son couvent, cette dernière préfèrerait sans doute séjourner auprès d'une autre jeune femme plutôt qu'à Buckingham. Georgie et Hannelore seront en outre invitées à des soirées mondaines au palais pour que David puisse faire la rencontre tant espérée... Georgie n'ose pas dire à la reine qu'elle n'a aucun domestique, qu'elle se prépare elle-même son petit déjeuner, s'habille seule et fait son lit : comment accueillir une altesse royale ? Grâce à son grand-père roturier et à sa meilleure amie Belinda, la princesse allemande, qui a un bon coup de fourchette (de nouveau, les passages gourmands ne manquent pas), sera toutefois reçue comme il se doit :
Mme Huggins avait confectionné un délicieux pâté en croûte qu'Hanni attaqua avec enthousiasme.
"J'aime la cuisine anglaise", déclara-t-elle.
Je dus admettre que le plat, servi froid avec des betteraves et des oignons au vinaigre et de la laitue, semblait excellent. Mais je ne parvins ni à mâcher ni à avaler quoi que ce soit. Lorsque mon grand-père apporta ensuite un gâteau roulé à la confiture servi avec de la crème anglaise, Hanni laissa échapper des petits cris de joie avant de se jeter dessus.
D'ailleurs, notre héroïne comprend très vite que les conditions d'hébergement de son illustre invitée ne constitueront pas le seul problème... Hannelore est belle comme le jour, or elle parle un argot terrible appris dans les films de gangsters américains, a un net penchant pour les boissons fortes ainsi que pour le vol à l'étalage, et sa façon d'évoquer les "beaux mecs" ferait rougir toutes les nannies anglaises poussant leurs landaus dans Green Park !
"Il va me falloir vous surveiller de près, lui dis-je. Vous risquez de briser de nombreux coeurs, à Londres.
- Qu'est-ce que je vais briser ? demanda-t-elle avec son adorable sourire plein d'innocence.
- Des coeurs. Des tas de messieurs anglais vont tomber amoureux de vous.
- Je l'espère. Je veux être une poule sensuelle et sexy. Vous pouvez me donner des tuyaux ?"
Et lorsque les hommes commencent effectivement à tomber comme des mouches, voire à trépasser, autour d'Hanni, Georgiana doit de nouveau jouer les enquêtrices de choc. Si tout finit bien, les Windsor lui devront une fière chandelle ! A condition qu'Hannelore ne soit pas venue pour rien à Londres et que le Prince de Galles délaisse sa pourtant détestable Wallis : rien n'est moins sûr, comme on le sait déjà...
Du premier mot à la dernier ligne, quelle délicieuse ambiance "british" !
De la limonade et des sandwiches furent apportés. Jensen Hedley entraîna Gussie vers le court de tennis. La baronne s'installa dans l'une des chaises longues et se servit généreusement en sandwiches. Ils me paraissaient tellement tentants - oeufs et cresson, crabe et concombre, et même saumon fumé, mon préféré - que je m'apprêtais à l'imiter quand un homme dans une tenue de cricket blanche toute froissée s'approcha d'un pas nonchalant sur la pelouse.
Quelques "sandwiches" à grignoter au soleil (fromage frais, jambon, endive croquante, poivre).
D'un manoir du Norfolk (où l'on sert du Pimm's et des cocktails sur la terrasse) aux vénérables murs de l'université de Cambridge (où l'on visite brièvement une merveilleuse bibliothèque), en passant par une garden-party mouvementée à Buckingham, pas moyen de s'ennuyer aux côtés de Georgiana ! Il y a même un aspect politique plus profond dans cette aventure-ci : en cette année 1932, on y évoque largement les socialistes, les communistes, la Russie et, d'un autre côté, les fascistes de Mussolini, la montée du nazisme d'Hitler et les Chemises Noires britanniques du terrible Oswald Mosley (par ailleurs beau-frère de Nancy Mitford). Bref, toujours aussi réjouissante, chic et efficace, cette série aux personnages truculents me plaît décidément énormément. A lire aussi : l'avis de Clarabel, paru juste après ; Belette a aimé le tome 1.
368 pages