Un 14 octobre en vadrouille : Cédric Gras, "L'hiver aux trousses"
Cela faisait un petit moment que je n'avais pas lu d'écrivain voyageur. Eh bien, ça me manquait !
Avec Cédric Gras (né en 1982) et son ouvrage de géographie narrative paru en 2015, direction l'Extrême-Orient russe. Amoureux de l'automne, de ses couleurs, de son apaisement, de cette saison qui annonce"la fin, posément", Cédric Gras a conçu un parcours Nord-Sud pour le rechercher, le vivre et le contempler 3 fois en 2 mois, dans 3 régions successives, jusqu'aux rivages de la Mer du Japon. A pied, en camion (de marque Oural, bien sûr), en bateau, en avion parfois (Antonov, évidemment), c'est son périple qu'il nous relate ici...
"A quelques encablures du cercle polaire, Khandyga était le point le plus septentrional de cette expédition hasardeuse et poétique. L'automne y était à point. Les feuillages couvraient les branches autant que le sol. Je devais désormais cheminer avec ce flamboyant compagnon et ne plus le lâcher d'une semelle."
Un peu plus bas géographiquement mais plus haut en altitude :"A ces latitudes, la hauteur a des pouvoirs décuplés sur les températures, la flore et la vie. C'est là que j'ai retrouvé mon rêve, quelque part, aux prémices de l'hiver, aux dernières lueurs de l'automne, aux confins des saisons. On démêlait avec peine les lumières de l'une et de l'autre dans ce jour déjà pâle et teinté de rougeurs. C'était et ce n'était plus l'automne, c'était et ce n'était pas encore l'hiver, un moment indécis, un sursis, avec le sentiment jubilatoire de fermer la marche, d'être les derniers avant le blizzard."
Encore plus loin, au cours du "3ème automne" : "L'automne me déroulait inlassablement son tapis rouge tandis que me poursuivait le souffle du dragon polaire."
Des paysages magnifiques (bien qu'ils n'occupent pas la première place) dans un climat et des conditions forcément rudes. Mais aussi de belles rencontres : ainsi, voici Alena, la maire d'un village complètement perdu et isolé de la taïga, qui va voir ses administrés par voie fluviale et envoie ses 2 enfants au collège, au loin pour plusieurs mois. J'ai aussi noté ce couple de pêcheurs qui hébergent volontiers le géographe :"Le voyageur s'enfonçant vers l'inconnu rencontre toujours une ultime maison isolée, un dernier thé chaud alors qu'il se pensait déjà seul au monde."
Une lecture qui vous transporte.
Malgré beaucoup de nostalgie, cette"nostalgie du futur" dans des régions reculées au lustre passé et qui connaissent un automne perpétuel depuis 30 ans. Malgré un style parfois un peu trop raffiné, recherché, ampoulé POUR MOI (ce qui a ralenti ma lecture - mais finalement, je me demande si, quand on tient ce genre de livre entre les mains, la lenteur est forcément un aspect négatif...?!). Malgré aussi de fréquents exposés historiques ou géographiques qui m'ont moins intéressée que la démarche et le parcours en eux-mêmes (je ne cacherai pas que j'ai passé plusieurs chapitres...). Je garderai tout de même en tête de très beaux paragraphes sur l'automne, des odeurs et des saveurs. Merci, Choco-Mum, pour le prêt ! ^_^
Ailleurs : la chronique de Margaud Liseuse.
267 pages
Pour les oreilles : "Ma nouvelle valise" (1989).
Chez Kobaitchi qui m'accompagne dans cette aventure :
un 14 octobre avec