Balli Kaur Jawal, "Le Club des veuves qui aimaient la littérature érotique"

21 juin 2022

Balli Kaur Jawal, "Le Club des veuves qui aimaient la littérature érotique"

Sans titre 2

Repéré (entre autres) chez Myrtille et Hilde, ce roman feel-good engagé m'a plu et étonnée.

Issue d'une famille indienne sikhe, Nikki, 22 ans, née à Londres, vit au coeur de la capitale anglaise, s'entend assez bien avec sa soeur mais a voulu prendre un peu de distance par rapport à leur mère. L'héroïne travaille pour l'instant comme barmaid dans un pub, loue un petit appart juste au-dessus du bar mais cherche un autre job pour arrondir les fins de mois.
Passionnée de littérature (et amoureuse d'un ouvrage quasiment introuvable de Beatrix Potter), Nikki répond à une annonce prometteuse : une association de femmes sikhes cherche un professeur d'anglais pour 2 cours par semaine, dans une des salles attenantes au grand gurdwara (de Southall (temple + foyer pour les petites annonces matrimoniales + lieu de réunion + cafétéria : le langar).
Officiellement, ses élèves viendront parfaire leur maîtrise de la langue anglaise. Officieusement, ces femmes de tous âges, majoritairement des veuves vénérables, cherchent un espace où échanger sans censure et où laisser libre cours à leur imagination débridée : un recueil de nouvelles érotiques naîtra étrangement de ces cours du soir !
Comment les Frères, veillant au respect des règles religieuses dans leur quartier, gardant toujours un oeil sur les femmes qui fument ou tardent à ajuster leur voile avant la prière, vont-ils réagir ? Nikki sait qu'elle joue là un jeu dangereux mais elle se sent vite liée à ses étudiantes ! Le cours d'écriture permettra de délier les langues (dans tous les sens du terme ;-p) et même de rouvrir une enquête pour élucider la mort mystérieuse de Maya, la fille de la directrice de l'association : un tour scénaristique surprenant, qui fait réfléchir sur les pressions exercées sur les femmes indiennes.

Les textes "olé-olé" sont certes là mais ils sont bien plus qu'un prétexte : ils vont ramener la vie et l'espoir dans bon nombre de foyers de cette communauté ! J'ai été sensible aux liens qui se tissent entre les personnages, avec un côté très authentique, très réaliste ; rien ne m'a paru "too much" ni trop artificiel. Il y a une grande tendresse dans ce livre parfois nécessairement rude. Enfin, j'ai aimé le message féministe et la dimension sociale car ce roman s'interroge avec bienveillance sur la place des femmes orientales en Occident. J'ai aimé découvrir leurs doutes et leurs aspirations, entre le poids de la tradition et leurs envies de liberté...
345 pages

(billet 2022 n°9)

De nombreux passages gourmands m'ont donné grand faim : beaucoup d'épices et de thé chai, du roti (pain plat indien), des pickles, des pois chiches et du curry d'épinards, du dhal de lentilles, des friandises sucrées aussi... Blandine et Hilde, j'ai beaucoup pensé à vous ! ^_^