Jean-Louis Fetjaine, "Les voiles de Frédégonde"

 

Après avoir adoré Les chroniques des elfes puis La trilogie des elfes de Fetjaine, j'ai découvert le premier volume de ses Reines pourpres. En bon historien et avec un grand talent de conteur, Fetjaine commence par retracer efficacement les grandes étapes des règnes de Clodion, couronné roi en 388, de Mérovée, qui a combattu des Huns d'Attila dans une gigantesque bataille digne de celles de la Terre du Milieu, et de Clovis, qui a considérablement étendu le royaume franc.

La menace la plus terrible ne viendra cependant ni des Saxons ni des Huns, mais de la haine tenace et meurtrière entre deux femmes, deux reines ennemies, deux dames de sang : les reines pourpres, Frédégonde et Brunehilde. (ou Brunehaut)

Nous sommes en l'an 557, le terrible roi Clotaire Ier, un des fils de Clovis, règne sur la Francie, dont les frontières ne sont pas les mêmes que celles d'aujourd'hui : le territoire franc, administré à la romaine mais peuplé en grande majorité de Gaulois, s'étire loin vers l'Est, jusqu'au milieu de l'actuelle Allemagne ; la Bretagne, elle, constitue un territoire indépendant. Clotaire a 4 fils : Gontran, Caribert et Sigebert, nés d'un premier mariage, puis Chilpéric, issu d'une seconde union.

A 13 ans, une belle jeune fille sans nom, vierge mais élevée dans les rites païens, est recueillie par un abbé qui la sauve de l'esclavage en la faisant entrer au service de la timide princesse Audowère, 17 ans, mariée à Chilpéric, le plus jeune fils du roi Clotaire. Comme il lui faut un nom pour devenir une femme libre à part entière et puisqu'elle sera la dame de compagnie d'une princesse à la cour de Soissons (et gouvernante de ses 3 enfants !), la jouvencelle reçoit un nom : elle sera Frédégonde qui signifie "la paix et la guerre" en langue franque et, amoureuse de Chilpéric, sensuelle, envoûtante, fera tout pour devenir reine à ses côtés.

"La paix pour ceux qu'elle aimait, la guerre pour ses ennemis..."

Face à elle, Brunehilde, princesse wisigothe d'Espagne à laquelle son beau-frère, le puissant Sigebert, s'est marié sur le tard. Brunehilde, dont Chilpéric épousera en deuxièmes noces la sœur afin d'agrandir son royaume (pauvre Galswinthe, qui connaîtra un bien triste sort). En ces temps où les rois prenaient plusieurs femmes, avaient des concubines, répudiaient leurs épouses si nécessaire, Frédégonde va être adorée, délaissée, humiliée, séduite à nouveau, finalement épousée, bref un vrai tourbillon de passion...

J'ai aimé rencontrer ces personnages féminins forts, qui jouaient finalement un rôle politique aussi important que leurs maris ou amants. Contrairement au rustre Chilpéric (une scène le montre tout particulièrement), j'ai trouvé Sigebert, le plus réfléchi, le plus fin et le plus puissant des 4 frères, très intéressant. Le cadre historique est précisément reconstitué, les complots et les alliances bien rendus, de même que la lutte entre une lignée de rois tenant son pouvoir de Dieu et une Eglise présentée comme un artifice (Quel est donc ce souverain céleste qui fait mourir de si grands rois ?), bref ce fut une lecture fort appréciée. Le tome 2 me plairait aussi, je pense...
533 pages